Après l'offensive de Macron sur la sécurité, la droite surenchérit

POLITIQUE - Un parfum de campagne. Avec sa tournée des points chauds en voiture banalisée, puis son bain de foule dans les “quartiers sensibles” de Montpellier lundi 19 avril, Emmanuel Macron s’est extirpé quelques instants de la gestion de...

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Après l'offensive de Macron sur la sécurité, la droite surenchérit (photo d'illustration prise le 17 mai 2020)

POLITIQUE - Un parfum de campagne. Avec sa tournée des points chauds en voiture banalisée, puis son bain de foule dans les “quartiers sensibles” de Montpellier lundi 19 avril, Emmanuel Macron s’est extirpé quelques instants de la gestion de la crise sanitaire, des courbes et autres graphiques anxiogènes. L’occasion pour lui de causer sécurité, donc, quelques heures après avoir défendu son action “pour le droit à une vie paisible”, longuement, dans Le Figaro.

Le chef de l’État mène cette offensive à l’heure où les forces de l’ordre clament à nouveau leur colère, indignées par le verdict du procès dit des “policiers brûlés” à Viry-Châtillon, un soir d’avril 2016 en Essonne. Ils sont plusieurs centaines à être descendus dans la rue ce mardi pour demander à Emmanuel Macron de mettre fin au sentiment d’impunité des délinquants.

Un contexte éruptif qui n’a pas échappé à la droite. Les Républicains, qui se sont fait une spécialité d’attaquer le bilan régalien d’Emmanuel Macron, un thème pourtant érigé en priorité de la fin de son quinquennat, se relaient dans les médias dans une forme de course à l’échalote sécuritaire. Le tout, à un an d’une élection présidentielle qui promet de faire la part belle à ces enjeux. 

Xavier Bertrand veut changer la Constitution

Ce n’est sans doute pas pour rien si les réactions les plus virulentes à droite émanent de candidats qui imaginent “jouer un rôle” au printemps 2022. Le président de la région Hauts-de-France, Xavier Bertrand qui a fini par officialiser sa candidature le 13 avril dernier, a par exemple proposé, ce mardi, de modifier la Constitution pour pouvoir condamner à des “peines planchers” les agresseurs de policiers.

“Quand on attaque un policier, un gendarme, un pompier, un maire, il y aura une peine de prison automatique minimum d’un an non aménageable”, a-t-il ainsi expliqué sur Europe 1 en certifiant qu’avec une telle mesure “il n’aurait pas pu y avoir d’acquittement” dans le procès en appel de la violente agression de policiers à Viry-Châtillon, pour laquelle cinq jeunes sur treize ont été condamnés.

De quoi déclencher la réaction immédiate de plusieurs figures du monde judiciaire, à l’image de l’avocat Frank Berton, mais surtout du garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti, lequel a raccroché l’idée de l’ancien ministre de la Santé de Nicolas Sarkozy, à la “logique de la rafle.”“Monsieur Bertrand propose donc une modification de la constitution pour envoyer en prison automatiquement toute personne interpellée sans preuve, ni procès”, s’est ému l’ex-ténor du barreau, souvent en 1ère ligne pour fustiger les “dérives” de la droite, dans un message publié sur les réseaux sociaux.

Nous reprenons les peines planchers, l’idée est de faire passer la loi de 6 mois de prison à un an, quand on s’en prend aux forces de l’ordre."Éric Diard, député LR proche de Xavier Bertrand

Rien de tel, réplique Xavier Bertrand qui précise sa pensée sur Facebook. “J’assume parfaitement que la loi pénale puisse fixer des peines minimales automatiques lorsque c’est nécessaire”, écrit le président de la région Hauts-de-France quelques heures après son passage sur Europe1. Et de rappeler, ce qui manquait dans son intervention matinale, que cette peine est “prononcée par un tribunal, au terme d’un procès équitable, dans le respect du contradictoire et sur la base d’un dossier et de preuves permettant d’établir les faits.”

“Le garde des sots”, accuse un député LR

Contacté par Le HuffPost, l’entourage du candidat à la présidentielle démine lui aussi le sujet, sans oublier d’égratigner Éric Dupond-Moretti. “Il n’a pas quitté ses anciennes fonctions, il est dans l’effet de manche. Ce n’est plus le garde des sceaux mais le garde des sots”, tacle Eric Diard, député LR, proche de Xavier Bertrand, avant d’expliciter sa proposition: “nous reprenons les peines planchers, l’idée est de faire passer la loi de six mois de prison à un an, quand on s’en prend aux forces de l’ordre.” 

Le causementaire nuance aussi, du bout des lèvres, la formule de Xavier Bertrand qui assure qu’une telle mesure aurait été de nature à empêcher les “acquittements” dans le procès de Viry-Châtillon. “On ne peut pas savoir, on ne se substitue pas au procès, mais l’idée est d’allonger la peine minimale pour ne pas avoir des délinquants qui sont sous bracelets électroniques au lieu d’être en prison”, nous dit Eric Diard.

Du côté du ministère de la Justice, on estime que “l’entourage de Xavier Bertrand panique et tente une diversion en évoquant la réponse du ministre parce qu’ils se rendent compte que ce qu’ils ont dit est une aberration et une imposture.” Et d’ajouter: “La preuve, ils rétropédalent”.

Pécresse et les “petites peines” de 18 ans

Marche-arrière ou non, le président de la région des Hauts-de-France n’est en tout cas pas le seul à droite à se faire entendre dans cette séquence. Loin de là. Après les réactions indignées d’Éric Ciotti, Renaud Muselier ou Valérie Boyer, sans compter celles de l’extrême droite, c’est Valérie Pécresse qui a clamé toute sa colère, mardi, sur BFMTV, à propos de la décision rendue dans l’affaire de Viry-Châtillon, parlant de “défaillance judiciaire” dans ce procès.

“Il fallait prononcer des peines très dures. Aujourd’hui, la loi autorise la détention à perpétuité pour les meurtriers de policiers”, a-t-elle martelé, en regrettant “des peines légères entre six et dix-huit ans de prison.” Dans sa diatribe et pour appuyer sa démonstration, l’ancienne ministre n’a d’ailleurs pas hésité à accuser “le procureur de la République” d’avoir expliqué que les délinquants en question étaient “une chance pour la France”. Faisant sans doute référence au récit de Thibault de Montbrial, l’avocat de l’une des victimes, publié dimanche dans Le Figaro, selon lequel ces propos auraient été tenus par l’avocat général, lors de ses réquisitions.

 “La justice n’a pas pris pleinement la dimension de cette affaire”, appuyait encore Valérie Pécresse sur BFMTV, entre autres appels à la “reconquête républicaine”.

En route pour 2022

Une façon surtout pour cette potentielle candidate à la présidentielle, comme pour Xavier Bertrand, de poser les 1ers jalons d’un programme politique tandis qu’Emmanuel Macron continue de creuser son sillon sur les questions sécuritaires, chères à la droite. 

À raison? Plusieurs sondages réalisés à un an de l’élection montrent que le sentiment d’insécurité, alimenté, entre autres, par la multiplication des faits divers médiatiques, jouera un rôle au printemps 2022. “Actuellement, la lutte contre la délinquance est jugée ‘tout à fait prioritaire’ par 69% des Français, c’est certes moins que la lutte contre le Covid-19 (82%), mais la question de la délinquance se situe au même niveau que la lutte contre le chômage (70%) et nettement devant la protection de l’environnement (59%)”, relève Jérôme Fourquet, le directeur du pôle opinion et stratégies d’entreprise de l’Ifop, ce mardi, dans une entrevue au Figaro.

Selon lui, “l’exaspération face à la délinquance influera sur le résultat de la présidentielle.” Alors dans ce contexte, certains députés de la majorité n’entendent pas rester sur le carreau de la surenchère. Sur Twitter, l’élu LREM de l’Indre François Jolivet, profite des débats autour de Viry-Châtillon pour mettre en avant une proposition de loi visant à “retenir la responsabilité des parents pour les infractions pénales commises par leurs enfants mineurs au titre de la complicité.”

En d’autres termes: pénaliser les familles dont la progéniture verse dans la délinquance. Une idée “peu explorée”, selon ses mots, portée par la droite depuis des années.  

À voir également sur Le HuffPost: L’amertume de ces policiers après le verdict de Viry-Châtillon