Beauvau de la Sécurité: ce que les syndicats de police ont déjà obtenu

POLICE -  “Pour l’instant, le ministre a répondu en tout point à nos attentes.” Voici comment Fabien Vanhemelryck, secrétaire général d’Alliance Police nationale expliquait dans Le Monde, le 14 janvier dernier, que son organisation allait finalement...

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Ce lundi 25 janvier, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin présente aux syndicats de police le

POLICE -  “Pour l’instant, le ministre a répondu en tout point à nos attentes.” Voici comment Fabien Vanhemelryck, secrétaire général d’Alliance Police nationale expliquait dans Le Monde, le 14 janvier dernier, que son organisation allait finalement prendre part au “Beauvau de la Sécurité” convoqué par Gérald Darmanin. Comme Alliance, une autre puissante formation, l’Unsa, annonçait la même chose, quelques semaines seulement après que les deux syndicats avaient pourtant assuré boycotter le rendez-vous promis par Emmanuel Macron.

Et pour cause: alors que le ministre de l’Intérieur présente seulement l’événement aux organisations syndicales ce lundi 25 janvier, celles-ci ont d’ores et déjà obtenu des garanties d’importance de la part du gouvernement. Avant que les discussions commencent officiellement donc. 

Les sept “chantiers” du Beauvau...

Le “Beauvau”, c’est cette consultation des syndicats policiers promise par le chef de l’État début décembre, au cours d’une interview accordée à Brut en pleine polémique sur les violences policières, à la suite notamment de la très violente interpellation de Michel Zecler. 

Officiellement ouvert dans les prochains jours, il va se composer de rencontres officielles au ministère de l’Intérieur, place Beauvau, mais aussi en province, et ce jusqu’au mois de mai. Partout, les fonctionnaires de police seront notamment invités, comme lors du “grand débat”, à remplir des cahiers de doléances pour faire remonter besoins et inquiétudes. L’objectif est d’aboutir, à terme, à une annonce de financements augmentés pour la police et la gendarmerie et, comme l’explique le ministère, “de poser les bases de la future loi de programmation de la sécurité intérieure pour 2022″. 

Pour ce faire, les discussions devront porter sur sept chantiers principaux, tels que les a détaillés Gérald Darmanin lors d’une audition en commission des lois: la formation initiale et continue des policiers, l’encadrement des forces de police, les dotations matérielles, l’IGPN et les inspections internes, les effectifs destinés au maintien de l’ordre, le lien entre les forces de sécurité intérieures et la population, et finalement, sujet de tant de débats ces derniers jours, la possibilité de filmer ou pas le visage des fonctionnaires de police. 

Un programme qui a immédiatement été fustigé par les deux organisations syndicales que sont donc Alliance et l’Unsa, lesquelles ont déclaré qu’elles ne participeraient pas aux discussions. “On a refusé d’évoquer de nouvelles réformes alors que des sujets déjà existants n’ont pas été traités”, précise au HuffPost un responsable de l’Unssa. Fabien Vanhemelryck est même allé jusqu’à qualifier le “Beauvau” d’indécent ”énième séminaire sans mesure concrète au préalable”. 

... et la création d’un huitième 

Une annonce choc pour le ministère. En effet, les deux syndicats sont, à eux deux, majoritaires dans l’ensemble des commissions et comités techniques de la police nationale (CTM, CTRPN, CAPN). Difficile dès lors de lancer un grand projet de rénovation sans eux. C’est la raison pour laquelle Gérald Darmanin et son entourage ont dû faire des concessions. 

L’exécutif a tout d’abord accepté d’ajouter un huitième chantier à sa liste: celui de la “réponse pénale”. En clair, de savoir comment ceux qui agressent ou menacent des policiers seront punis par la justice. Car à ce propos, l’Unsa et Alliance sont remontés. “La justice va enfin être obligée de rendre des comptes”, dénonce ce dernier syndicat, qui se réjouit que le “police bashing” (comprendre le fait de dénigrer la police) puisse enfin être combattu. 

Les organisations veulent notamment que les auteurs de violences puissent être identifiés, qu’ils soient condamnés et que les peines soient appliquées. C’est ainsi qu’Alliance a obtenu mi-décembre la création d’un “observatoire de la réponse pénale” censé faire la transparence sur ce qu’il en est réellement des “peines encourues, peines prononcées et peines exécutées” après des violences commises contre des fonctionnaires de police. L’idée est, pour citer Alliance, de “lutter contre l’impunité”. 

“Payés pour servir, pas pour mourir”

Dans un courrier envoyé mi-janvier aux syndicats, Gérald Darmanin s’est ainsi plié à leurs souhaits, s’engageant à ce que “la question de la relation avec l’autorité judiciaire” soit “intégrée” dans la conférence. Comme huitième chantier donc. 

Et fortes de ce succès, les deux organisations syndicales comptent aller encore plus loin lors du “Beauvau”, en décrochant la création d’une peine minimum contre les agresseurs de policiers, avec un emprisonnement incompressible à la clé. “Payés pour servir, pas pour mourir”, peut-on lire à cet égard sur un tract d’Alliance. Les syndicats rejettent ainsi l’idée qu’il y aurait des “incivilités” commises contre les leurs, comme a pu le déclarer Emmanuel Macron, mais veulent que l’on parle à la place de crimes et délits, qui seraient justement sanctionnés par la loi. 

En outre, la façon dont sont traités les policiers devant la justice doit être abordée dans le cadre de ce huitième chantier. “Dans une affaire judiciaire, le policier est victime, du fait de ses fonctions, ou alors il est mis en cause du fait d’une action menée dans le cadre de ses fonctions”, nous explique une source syndicale. “Nous ce que l’on veut, c’est que cela soit reconnu et que les policiers puissent bénéficier d’une aide judiciaire pour se défendre en justice. L’Unsa souhaiterait également un “partage d’information” entre la justice et la police, de manière à ce que les policiers puissent savoir ce qu’a donné leur travail, si des condamnations ont suivi, si leurs investigations ont été retenues.

C’est dans le même ordre d’idée que les syndicats au départ réfractaires à l’idée même du Beauvau ont obtenu des explications quant à la position de l’exécutif sur le floutage du visage des policiers. Et sur ce point, organisations et gouvernement sont sur la même longueur d’onde: ils veulent que le visage des policiers puisse être flouté, de manière à ce que l’institution soit éventuellement incriminée dans le cas d’une controverse, plus que l’individu. “Nous on est d’accord pour que tout soit filmé, on veut juste éviter que certains policiers puissent être visés individuellement et injustement”, nous décrit un syndicat.

Des mesures sociales devant enfin être appliquées 

L’autre grande victoire des deux formations s’est quant à elle jouée au niveau social. En effet, Alliance et l’Unsa ont obtenu grâce à leur ultimatum que des mesures sociales soient enfin actées. Dans un protocole signé en 2016 par les partenaires sociaux et le ministre de l’Intérieur d’alors, Bernard Cazeneuve, il était effectivement prévu plusieurs mesures, auxquelles Gérald Darmanin a enfin consenti dans son courrier du mois de janvier. 

La première, c’est la gratuité des transports nationaux au 1er janvier 2022. L’idée est que les fonctionnaires de police puissent retrouver gratuitement leur famille sur leurs jours de repos, via un TGV ou un train Intercités. “On a des policiers qui statutairement sont bloqués sur le lieu de leur première affectation pendant cinq ou huit ans. Et pendant cette période-là, les conjoints ne peuvent pas forcément les suivre”, nous précise une source syndicale, “ce qui cause des grandes situations de détresse et qui pousse certains collègues à dépenser des sommes incroyables en transports”. Les modalités précises sont encore en discussion, mais cette concession va bien au-delà d’un simple remboursement du trajet entre le domicile et le lieu de travail les jours de service. 

La seconde, concerne la participation de l’État à la mutuelle des policiers. Elle a d’ores et déjà été programmée mi-décembre pour l’ensemble de la fonction publique par la ministre concernée, Amélie de Montchalin, mais un calendrier précis a été donné pour la police nationale et le ministère de l’Intérieur ambitionne d’être le premier à l’offrir à ses fonctionnaires. Ainsi, il est prévu que l’État atteigne, entre janvier 2022 et janvier 2024, 50% de subvention de la mutuelle. 

Deux engagements qui existaient donc déjà, mais que les syndicats sont parvenus à rendre tangibles avant même le début du “Beauvau de la Sécurité”. Citant la célèbre phrase de Georges Clémenceau - “Si vous voulez enterrer un problème, nommez une commission” - l’Unsa se félicite ainsi dans un tract que des dispositions antérieures soient appliquées avant même de passer à de nouvelles négociations. “Commençons par respecter les engagements pris et signés avec le ministère de l’Intérieur en 2016”, réclamait le syndicat. 

C’est désormais chose faite, et les discussions vont donc pouvoir débuter entre les organisations syndicales et le ministère de l’Intérieur. Pour autant, confortés par ces victoires précoces, les syndicats ne comptent pas laisser l’exécutif dicter le rythme et le contenu des échanges. Par la voix de ses dirigeants, Alliance a déjà prévu: si “les annonces ne sont pas suivies de mesures concrètes”, ils se retireront à nouveau des discussions. 

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