Qu’est-ce qu’on regarde ce dimanche soir, 9 mai ? “Daft Punk’s Electroma” sur Arte

Pour évoquer Daft Punk’s Electroma, on pourrait rédiger une sorte de tract, ou de flyer, comme au bon vieux temps des free-parties. L’intitulé en serait le suivant : “Le jour : samedi. L’heure : minuit. Le point de rencontre : le cinéma du...

Qu’est-ce qu’on regarde ce dimanche soir, 9 mai ? “Daft Punk’s Electroma” sur Arte

REJOINDRE L'ÉQUIPE DE RÉDACTION

Tu penses avoir un don pour la rédaction ?
Contacte-nous dès maintenant pour rejoindre notre équipe de bénévoles.

POSTULER

REJOINDRE L'ÉQUIPE DE RÉDACTION

Tu penses avoir un don pour la rédaction ?
Contacte-nous dès maintenant pour rejoindre notre équipe de bénévoles.

POSTULER

REJOINDRE L'ÉQUIPE DE RÉDACTION

Tu penses avoir un don pour la rédaction ?
Contacte-nous dès maintenant pour rejoindre notre équipe de bénévoles.

POSTULER

Pour évoquer Daft Punk’s Electroma, on pourrait rédiger une sorte de tract, ou de flyer, comme au bon vieux temps des free-parties. L’intitulé en serait le suivant : “Le jour : samedi. L’heure : minuit. Le point de rencontre : le cinéma du Panthéon.” “Point de rencontre” et non pas “lieu” puisque, à peine arrivé·es dans la salle, il vous faudra repartir vers une location inconnue, quelque part dans le désert californien, en suivant la voiture noire, immatriculée “Human”, conduite par deux robots imperturbables. Attention cependant : après une station à Robot Town et à son mystérieux laboratoire de chirurgie esthétique, vous devrez finir le chemin à pied, délesté de vos dernières illusions.

Une expérience visuelle inédite

Mais, avant de s’engager dans ce beau film-trip, on peut aussi tenter, plus rationnellement, de retracer la route qui a mené des musiciens vers cette expérience visuelle inédite. De fait, dès le début de leur carrière discographique, avec l’album Homework, les deux Daft Punk ont su génialement combiner sons et images, tubes imparables et clips révolutionnaires : des histoires pathétiques de l’homme à tête de chien (Da Funk, tourné par Spike Jonze) à la danse absurde de troncs sauteurs (Around the World, tourné par Michel Gondry).

Avec leur second opus, Discovery (2001), cette combinaison prenait une tournure encore plus affirmée puisque à chaque chanson devait correspondre une vidéo, réalisée par Leiji Matsumoto. Mises bout à bout, ces vidéos auraient dû composer au final un seul film d’animation musical, Interstella 5555. Ce projet d’une ambition folle ayant échoué face aux lois du marché (seuls trois clips furent diffusés sur les chaînes musicales, et il fallut attendre la sortie en salles pour découvrir l’ensemble de la production), les Daft Punk décidèrent alors de séparer les champs.

>> A lire aussi : Daft Punk : une indépendance musicale, esthétique et économique chevillée au corps

D’un côté, le disque Human after All et les “classiques” vidéos d’accompagnement, Robot Rock et Technologic, qui permirent aux deux garçons de s’essayer, pour la 1ère fois, à la réalisation. De l’autre, le film Electroma, possédant sa propre bande-son (Todd Rundgren, Curtis Mayfield, Brian Eno, Sébastien Tellier), qui constitue comme le second volet, et la chute, de l’univers robotique inventé pour l’album. A ce parcours limpide manque pourtant un élément essentiel : la 1ère étape.

Avant la musique, le cinéma

Amis d’enfance, Thomas Bangalter et Guy-Manuel de Homem-Christo ne se sont pas, en effet, retrouvés autour de la musique mais bien d’abord du cinéma. Cette cinéphilie ancienne qui mélange Stanley Kubrick et Paul Morrissey, films d’horreur et comédies romantiques, explique sans doute qu’Electroma réussisse à dépasser la performance planante pour accrocher quelque chose de plus singulier et d’émouvant dans l’histoire sans paroles de ces deux androïdes qui cherchent désespérément à devenir des hommes.

Rencontrés en 2006 à Cannes, les deux hommes défendaient, d’ailleurs, avec une grande acuité, la spécificité de leur film contre la tentation de n’y voir qu’un simple dérivé de Gerry (2002) ou de Brown Bunny (2003) : “Nos références sont autant les films de Gallo et de Van Sant que les œuvres des années 70 qui les ont eux-mêmes inspirés. Ce qui est intéressant, c’est de voir quelles sont les sources exactes des uns et des autres, qui ne sont pas forcément les mêmes, et ce qu’on en fait. Pour nous, on cherchait vraiment à mêler Easy Rider et 2001 : l’Odyssée de l’espace, un truc hyper chaud et un truc hyper froid, pour obtenir la sensation globale qu’on recherchait, celle que l’on garde en souvenir après avoir quitté la salle.” Mais c’est dans le temps même de sa projection qu’Electroma marque, peut-être, sa principale réussite.

>> A lire aussi : Daft Punk, l’entrevue fleuve

Déjà, en 2003, au Festival de Cannes, on se souvient clairement de la troublante hésitation qu’avaient provoquée les 1ères minutes de projection d’Interstella 5555. On avait senti, un instant, le public proche de basculer, de bondir hors de son fauteuil pour transformer le respectable auditorium en un dance-floor improvisé. D’une mélancolie parfaite, Electroma ne produit pas pareil effet de siège éjectable. Il n’en redéfinit pas moins, de façon plus subtile et durable, le statut du spectateur. Proche, par moments, de la vidéo d’artiste, par d’autres du clip, par d’autres encore de la narration cinématographique, le film ne cesse de faire vaciller notre posture naturelle. Tandis que, sur l’écran, des robots essaient leur masque humanoïde, c’est dans la salle que les mutants s’agitent.

Daft Punk’s Electroma est disponible jusqu’au 3 juin sur arte.tv