Qu’est-ce qu’on regarde ce soir ? “Il faut sauver le soldat Ryan” sur France 3

Si Steven Spielberg est bel et bien le père du blockbuster, il n’en reste pas moins un formidable conteur d’histoires. Toutefois, est-il un cinéaste ou un commerçant mégalomane ? Il faut sauver le soldat Ryan pose à nouveau la question. Après...

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Si Steven Spielberg est bel et bien le père du blockbuster, il n’en reste pas moins un formidable conteur d’histoires. Toutefois, est-il un cinéaste ou un commerçant mégalomane ? Il faut sauver le soldat Ryan pose à nouveau la question. Après La Liste de Schindler (1993), film sur la Shoah, voici le long-métrage sur le Débarquement censé surpasser tout ce qui s’est produit avant. Et l’auto-propagande spielbergienne fonctionne puisque, dès la sortie du projet, de nombreuses critiques martèlent “que la guerre n’avait jamais été filmée ainsi”, “que l’on s’y croirait”, mettant ainsi Fuller ou Mann au rancart.

Surenchère technique

En effet, les scènes de combat sont impressionnantes. Mais cela vient-il des pures qualités de cinéaste de Spielberg ? Ryan est bien un film de son temps dont la mise en scène semble fonctionner à l’EPO, destinée à battre des records définitifs. Quand on y réfléchit après coup, ces fameuses séquences bluffent surtout par leur surenchère technique : bande-son mitraillant sans relâche en THX, ralentis insistants sur des membres arrachés, tripaille s’écoulant d’un ventre…

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Parfois, au milieu de ce carnage en “effets spéciaux”, une belle idée, comme celle des plans sous-marins où des soldats sont abattus dans le silence et le rougeoiement de l’eau. Mais les belles idées sont souvent suivies d’autres plus saugrenues. Comme cet étrange plan furtif où l’on aperçoit des gouttes de sang sur l’objectif de la caméra. Point de vue subjectif d’un fantassin à lunettes ? Non. Point de vue d’une équipe de cinéastes militaires ? Non plus. Spielberg était-il alors lui-même à Omaha Beach ?

Summum d’artifice

La réponse, c’est que le cinéaste n’a pas su résister à un stupéfiant effet de réel (du sang sur l’objectif, comme les gouttes de pluie sur les caméras moto du Tour de France !) ; le plan étant injustifiable, ce petit supplément de réel se transforme en summum d’artifice. De même à la fin du film, quand on comprend qui est le vieux vétéran du début, on comprend aussi que le long flash-back qui constitue le film est truqué. Comme beaucoup de cinéastes, Spielberg s’arrange avec la vraisemblance . Disons simplement que ses arrangements sont beaucoup moins fins, beaucoup plus visibles que ceux d’un Hitchcock.

Pour le reste, entre divers emprunts à Fuller, Kubrick ou Sirk, Spielberg ne renouvelle pas grand-chose au film de guerre et s’enliserait plutôt dans un psychologisme fin comme un tank. Ainsi retrouve-t-on dans la patrouille de Tom Hanks – le Courageux, le Pleutre, le Violent, l’Intello – les souvenirs de la période civile, la discussion sur la validité de la mission, etc. Autant de figures obligées, de scènes ennuyeuses. L’échantillonnage sociologique est aussi presque complet avec le Rital, le Juif, l’Irlandais… Par contre, il n’y a pas de Noirs dans l’armée de Spielberg. De même qu’on ne voit pas du tout les Anglais, les Canadiens et à peine les Français (seulement une famille apeurée). Spielberg a fait le vide autour de son nombril national (hormis quelques Allemands ­: il faut bien quelques méchants).

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Made in the USA

Mais le cinéma américain étant ce qu’il est (et il l’est encore plus avec Spielberg), on ne peut s’empêcher de tiquer quand un film qui sera vu en masse dans le monde entier s’ouvre et se referme sur un gros plan de son drapeau (imaginons le malaise si cela arrivait dans un film français). On a beau savoir que les images hollywoodiennes “envahissent” les écrans et les rêves des peuples du monde, on aurait souhaité que Spielberg (qui, du reste, n’a pas tourné ce film en France) ne nous le rappelle pas avec autant d’arrogance.

Ryan montre que la jeunesse américaine a de toute façon  “perdu” cette guerre. Spielberg, quant à lui, a gagné depuis longtemps la bataille commerciale du cinéma.

Il faut sauver le soldat Ryan de Steven Spielberg, à retrouver ce jeudi 3 juin à 21h05, sur France 3