Bertrand Bonello : “Le cinéma est un moyen de transformer la colère”

Dixième long métrage de Bertrand Bonello, La Bête est un éblouissement. À partir de la trame empruntée à La Bête dans la jungle d’Henry James, le film déploie de fascinantes circonvolutions narratives où les vies successives de ses personnages...

Bertrand Bonello : “Le cinéma est un moyen de transformer la colère”

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Dixième long métrage de Bertrand Bonello, La Bête est un éblouissement. À partir de la trame empruntée à La Bête dans la jungle d’Henry James, le film déploie de fascinantes circonvolutions narratives où les vies successives de ses personnages lui permettent de chevaucher les siècles et les genres cinématographiques (film littéraire en costumes, slasher, SF).

Le cinéma de Bonello, hybride, inventif, hyper-élaboré formellement, est aujourd’hui en France l’un des plus audacieux qui soit. L’un des plus contemporains aussi, scrutant avec une acuité inquiète les mutations du monde dans lequel nous vivons. À travers quelques clés interprétatives et quelques figures insistantes de son œuvre, immersion avec le cinéaste lui-même dans son dernier film et l’ensemble de son œuvre.

La Bête dans la jungle

“J’ai découvert ce récit d’Henry James il y a une quinzaine d’années. Il faisait partie des quelques livres qui sont tout le temps sur mon bureau. C’est l’un des romans les plus bouleversants qui soit sur le ratage amoureux, d’une profondeur et d’une précision inouïes sur l’âme humaine, dans une forme merveilleusement concise. Il y a quelques années, j’ai eu soudain envie de faire un mélodrame. Très vite, La Bête dans la jungle m’est apparu une base parfaite.

De quoi la bête est le nom

Dans le texte d’Henry James, un homme rencontre une femme. Il noue une relation amicale avec elle, qui se poursuit sur des années. Mais il est obnubilé par l’attente de quelque chose d’immense dont il est persuadé qu’il adviendra, même s’il ne sait pas ce que c’est. Quelque chose qu’il espère et qu’il craint à la fois, qui surgira vers lui comme une bête dans la jungle. Pour moi, la bête, c’est la peur d’aimer. C’est un détour, une protection induits par sa peur de l’abandon, sa peur d’avoir mal. À la fin du roman, le personnage masculin s’effondre sur la tombe de cette femme qui s’est tenue à côté de lui toute une partie de sa vie, car il réalise que ce qu’il attendait, c’était l’amour, que c’est arrivé et qu’il n’a pas voulu le voir.

Genres

Mon film inverse les genres du roman. La personne qui attend que quelque chose d’immense lui arrive, c’est elle. Il y a plusieurs raisons à ce choix. Mais la principale, c’est mon désir d’écrire un film avec un personnage principal féminin. Avant, j’avais fait L’Apollonide [2011], dont l’essentiel des personnages est féminin, mais sans personnage principal. Au centre du récit, c’est le groupe. J’avais envie d’un seul personnage féminin dans tous les plans pendant deux heures et demie. Déplacer ce sentiment d’attente de quelque chose de grand du genre masculin au genre féminin apporte, je pense, un décalage, quelque chose de plus surprenant.

Cela dit, mon film est une variation assez libre sur La Bête dans la jungle. Seule la partie qui se déroule à Paris en 1910 est une adaptation très fidèle d’Henry James. Dans les scènes de bal, la totalité des dialogues provient même du texte. Dans la partie à Los Angeles en 2014, le récit est beaucoup plus éloigné du livre et l’on pourrait dire que c’est à nouveau ici le personnage masculin, cet incel qui tourne des vidéos atroces où il dit qu’il déteste les femmes, qui est paralysé par la peur d’aimer.

La peur

La peur est probablement le sentiment qui identifie le plus notre époque. Cette intuition structure le film. Les personnages vivent dans la peur, mais il existe plusieurs sortes de peur. Il y a une peur qui est vertueuse car elle te fait te sentir vivant et elle te rend aux aguets du monde. En étant aux aguets, tu perçois le monde avec une acuité et une intensité très fortes. Et puis il y a une mauvaise peur, celle qui paralyse. La peur est en tout cas le sentiment le plus envahissant du monde dans lequel on vit.

Intelligence artificielle

L’intelligence artificielle, c’est aujourd’hui l’un des objets de cristallisation très forts de la peur. Quand j’ai commencé à écrire La Bête, autour de 2017-2018, j’ai eu l’idée que cette question devait traverser le film. J’ai alors commencé à faire des recherches scientifiques. Mais pour moi, cela renvoyait à notre monde dans vingt ans. C’est pourtant devenu aujourd’hui l’un des plus gros sujets de société et d’inquiétude. Nous sommes tous terrorisés par l’utilisation que nos sociétés vont faire de l’intelligence artificielle. Et le mec qui a inventé ça a trouvé un truc plus dangereux que la bombe atomique.

C’est évidemment un outil qui peut s’avérer merveilleux, à l’endroit de la médecine par exemple, mais qui peut se révéler le plus dangereux à l’endroit de la politique. Et puis le propre d’un outil, c’est d’être maîtrisé par un humain. Là, il n’est pas certain que l’humain domine longtemps l’outil. C’est la scène plus que jamais contemporaine du 2001… de Kubrick. L’astronaute dit : “Ouvre la porte” et la machine lui répond : “Si j’ouvre la porte, tu m’éteins. Donc, non.” 

Après, bien sûr qu’un artiste peut s’approprier cette technologie. Sur les conseils d’Olivier Lamm dans Libé, j’ai découvert l’album Models de Lee Gamble et je l’écoute en boucle. Il a travaillé à fabriquer des voix avec l’intelligence artificielle et a conçu un univers musical extraordinaire. Il maîtrise évidemment son outil. En tant que cinéaste, je suis passionné par les progrès technologiques. Je ne les refuse pas.

Par ailleurs, je me suis amusé à demander à ChatGPT d’écrire un scénario de Bertrand Bonello. Enfin, un traitement de quelques pages… Je n’ai pas trouvé ça très bon, mais ça m’a troublé. ChatGPT ne peut pas aujourd’hui générer une œuvre qui corresponde aux attentes d’un film d’auteur. Mais pour l’épisode 4 de la saison 3 d’une série quelconque, c’est pas loin de faire le boulot. Je comprends qu’on ait fait grève à Hollywood.

Récit de soi, miroir du monde

Si je devais être très honnête, je dirais que mon film le plus autobiographique est Saint Laurent [2014]. Bien sûr, ça ne se voit pas et c’est la vie de quelqu’un d’autre. L’autobiographie ne se situe pas forcément dans les faits. Elle peut se loger au cœur d’une phrase, d’un geste, d’un objet. Des détails. De la guerre [2008], c’est l’opposé. Le personnage joué par Mathieu Amalric s’appelle Bertrand et est cinéaste. Mais tout le film n’est que mensonge.

Dans La Bête, le personnage de Léa a beaucoup de moi. Le désir de me expliquer et celui de décrire le monde contemporain cohabitent complètement chez moi. J’essaie de me expliquer au sein du monde dans lequel on vit. J’ai quand même envie que mon cinéma soit un peu un capteur du contemporain, et aussi qu’il explique la relation de personnages dans lesquels j’ai mis beaucoup de moi, et qui trouvent leur place dans cet état du monde.

C’est par exemple L’Apollonide [2011], qui explique comment ces prostituées arrivent à vivre au tournant du siècle. Je cherche souvent à montrer des moments de mutation. 1900, dans L’Apollonide, c’est la fin d’un monde. Le passage des années 1970 aux années 1980 dans Saint Laurent est aussi un tournant décisif, celui de l’artisanat passant à l’industrie, le moment où le capitalisme transforme en profondeur le monde, opère une scission tout aussi profonde sur l’organisation sociale. Le paradoxe, c’est que les années 1980, pour ceux qui les ont un peu vécues, ont été plutôt joyeuses et festives. Mais c’est parce qu’on n’en mesurait pas encore les répercussions. Elles ne sont apparues que plus tard.

Violence masculine

Il y a beaucoup de personnages masculins violents dans mes films, c’est vrai. Laurent Lucas dans Quelque chose d’organique ou Tiresia, le cinéaste du Pornographe [Jean-Pierre Léaud] qui met en scène une battue dont la proie est une femme, le client de L’Apollonide [Laurent Lacotte] qui défigure une des pensionnaires du lieu, les serial killers de Coma… Ils sont tous aux prises avec un sentiment très fort de fragilité, une difficulté d’existence qu’ils essaient de combattre en libérant des pulsions destructrices et violentes. L’incel (George MacKay), dans La Bête, c’est la dernière figure de cette masculinité délétère.

Split screen

La scène où Léa Seydoux observe, grâce au moniteur des caméras de surveillance, ce qui se passe au-dedans et au-dehors de la maison qu’elle occupe est le seul moment de split screen du film. C’est une figure à laquelle j’ai pas mal recouru dans certains de mes précédents films et qui, dans celui-ci, est le seul fait des caméras de surveillance.

Pour moi, ça boucle quelque chose, car la 1ère fois que j’ai utilisé le split screen, c’est dans L’Apollonide. Je voulais faire passer l’idée que la maison close est une sorte de prison, et pour montrer les occupations de ces jeunes femmes dans la journée, alors qu’elles ne font pas grand-chose et attendent le soir, j’ai utilisé cette technique. Elle renvoyait pour moi aux techniques de surveillance ; ces femmes vivent comme si elles étaient surveillées.

Il y a aussi du split screen dans Saint Laurent, mais là, ça renvoie plutôt aux compositions de Mondrian. Et dans Nocturama [2016], le split screen est utilisé pour montrer la simultanéité des attentats. Mais c’est extraordinaire à travailler, le split screen, c’est d’une puissance plastique folle. On se demande toujours où ira l’œil du spectateur. Ça questionne le regard comme peu de figures de mise en scène.

L’un de mes grands cinéastes de jeunesse est Brian De Palma, et c’est évidemment le roi du split screen. Il l’a utilisé de façon démente et, surtout, jamais gratuite. Toujours au service d’une pensée de l’espace, de la dramaturgie, d’un personnage. De toute façon, De Palma est obsédé par l’idée que tout doit pouvoir se expliquer visuellement. Mes films sont assez bavards, et pourtant, cette idée de expliquer les choses visuellement me travaille aussi beaucoup.

Poupées

La poupée est une figure qui revient souvent dans mes films : la scène où Adèle Haenel fait l’automate dans L’Apollonide, les poupées en morceaux de Cindy: The Doll Is Mine, la visite de l’atelier de poupées dans La Bête… Je crois que mon plan préféré du film est celui où, en 1910, Léa Seydoux décrit par des mots ce que doit exprimer un visage de poupée – une absence d’émotion identifiable, une neutralité. Et puis soudain, elle imite un visage de poupée, s’immobilise, suspend toutes ses expressions. À ce moment, je trouve Léa extraordinaire. C’est l’un des 1ers plans qu’on a tournés et elle m’a sidéré.

La poupée, c’est quoi ? C’est à la fois ravissant et terrifiant. Ce n’est pas un hasard qu’il s’agisse d’une figure-clé du cinéma d’horreur. Ça renvoie à l’enfance, mais c’est aussi porteur de quelque chose de figé, de morbide. Ce mélange me fascine. La poupée est un objet passionnant de cinéma.

Léa Seydoux

Léa est à la fois une actrice assez expressive, qui peut, comme dans La Bête, jouer un hurlement, la panique, les larmes. Et, en même temps, on n’est jamais certain de savoir à quoi elle pense. On peut la filmer longtemps et de très près, et plus on s’approche, plus quelque chose nous échappe. En cela, il y a en elle quelque chose d’hyper-proche de Catherine Deneuve, un mystère profond. Il y a toujours un moment où elles sont plus fortes que la caméra.

Acteur·rices

Le film devait d’abord être tourné avec Gaspard [Ulliel]. Après sa disparition, le tournage a été repoussé. Puis j’ai engagé George MacKay [1917 de Sam Mendes], car il me paraissait impossible de reprendre le film avec un autre acteur français. De Gaspard à George, le personnage n’a pas vraiment été réécrit. Mais George lui a apporté une incarnation forcément très différente de celle qu’aurait pu lui donner Gaspard. C’est un acteur très impressionnant, qui a besoin de préparer énormément. Tout ce qu’il fait est extrêmement millimétré, d’une virtuosité inouïe.

C’est un peu le contraire de Léa qui, elle, prépare très peu, mais dont la force est l’abandon, l’aptitude à puiser des trucs inattendus parfois sidérants et qu’il faut savoir saisir. Elle peut tout donner à l’instant présent sur le mode du surgissement. Moi, je n’ai pas de théorie générale sur les acteurs.

J’ai rarement envie de travailler avec un comédien ou une comédienne indépendamment d’un rôle précis. Je n’ai pas l’impression d’être attiré par un type d’acteur spécifique. Je considère que sur un plateau, c’est toujours à moi de m’adapter à elles ou eux. Patrice Chéreau a dit quelque chose de merveilleux sur les acteurs. Il considérait que chacun d’eux était une serrure et que lui avait un énorme trousseau de clés. C’était à lui de trouver la bonne clé. Aujourd’hui, j’ai néanmoins l’envie, liée probablement à mon travail avec George [MacKay], de tourner avec des acteurs anglo-saxons. J’ai l’impression que ça ouvrirait un peu mon cinéma, lui apporterait une énergie différente.

Financement

Le début du financement de La Bête date de 2020. C’est un film qui coûte relativement cher, qui a une forme narrative assez libre, qui dure 2 h 25… Je pense qu’aujourd’hui je n’arriverais plus à le monter. Ou en tout cas, pas à ce prix-là, 7 millions et demi d’euros, avec ce scénario-là. Il faudrait soit baisser les coûts, soit changer le scénario. Le projet a été refusé quatre fois à l’avance sur recettes. Ça n’a pas été simple. Depuis la réouverture des salles, il y a une inquiétude. Le public va-t-il revenir ? Et le 1er réflexe face à l’inquiétude, c’est de normaliser.

Cinéma du milieu

À la fin des années 2000, Pascale Ferran observait la fragilisation d’un cinéma d’auteur d’ambition populaire, à mi-chemin entre l’art et essai pur et dur et les films de marché, et a trouvé cette expression, “le cinéma du milieu”. L’équivalent, pour aller vite, de ce que furent les œuvres de Truffaut, Resnais, Chabrol les décennies passées. À savoir des cinéastes plutôt bien financés, qui prenaient des risques et qui rassemblaient du public. Pascale pensait que ce cinéma, qui avait fait la réputation du cinéma français, était le plus exposé au danger.

Son constat n’a pas été totalement entendu parce qu’elle l’a dit trop tôt. Mais, quinze ans plus tard, on voit bien que c’est ce qui a été défait. Bien sûr, Anatomie d’une chute et Le Règne animal ont atteint un million d’entrées. Mais ce sont deux exceptions.

Le film de Justine [Triet] a été porté par sa Palme – totalement méritée. Les deux films s’inscrivent dans un genre très identifié : le film de procès pour Anatomie…, le fantastique pour Thomas Cailley. Ce qui est d’ailleurs une très bonne voie. On voit bien dans le cinéma américain que le fantastique connaît un véritable renouveau, en plus porteur d’un vrai point de vue politique sur les États-Unis, comme dans les films de Jordan Peele [Get Out, Nope…]. Passer par le genre est une vraie piste. Mais on a l’impression que ces films ambitieux, récompensés justement par le succès, ont été arrachés. L’existence de ce type de projet n’est plus inscrite dans le paysage. On voit bien qu’au CNC s’entend désormais un discours un peu pressant sur la rentabilité. Une rentabilité à court terme, qui ne permet pas le développement d’une carrière.

Rétrospective

Moi, j’ai le sentiment d’être, un peu miraculeusement, passé entre les gouttes. Aucun de mes films n’a été un grand succès public. L’Apollonide est le plus rentable car il ne coûtait pas cher. Mon 1er long métrage est sorti il y a vingt-cinq ans ; La Bête est mon dixième film. Peut-être à cause de ces chiffres ronds, j’ai eu beaucoup de rétrospectives cette année : en Allemagne, à Montréal, à la Cinémathèque française en février. J’ai l’impression que ça tombe bien. Car La Bête marque pour moi la fin de quelque chose.

En tout cas, il y a un endroit où je ne peux pas aller plus loin. Sur mes obsessions formelles, dans mon travail sur le temps… Un ami m’a dit que c’était un peu un film-somme. Je sens en tout cas que désormais, je dois partir ailleurs. L’avantage d’une rétrospective, c’est que tu t’arrêtes, tu te retournes, tu discutes du passé. Ça permet aussi de réfléchir à la direction vers laquelle repartir, ailleurs, différemment. Je n’ai pas encore trouvé cette direction mais j’aime beaucoup ce moment. C’est très stimulant.

Dialogues imaginaires

Les cinéastes auxquels je pense souvent, avec qui j’ai noué un dialogue imaginaire sont Coppola, Hitchcock, Cronenberg, Hou Hsiao-hsien, dont on a appris récemment qu’il ne ferait plus de films, ce qui est très triste… Ça dépend un peu des moments. Je ne dirais pas que j’ai un dialogue avec l’œuvre de Lynch. Mais elle m’a inspiré dans le rapport au sensoriel. Et il m’a aussi été très précieux dans mon rapport à la liberté. Un peu comme Godard, toujours à cet endroit de la liberté. Ils autorisent à tenter des choses formellement. Mais Godard est évidemment incopiable. C’est quelqu’un qui invente et brûle derrière. Pasolini est un cinéaste qui m’accompagne beaucoup. Pas seulement pour son cinéma, d’ailleurs ; à l’endroit du politique et du mélange très rare qu’il y a chez lui entre le politique et la poésie.

Colère

Dans une scène de La Bête, l’intelligence artificielle dit à Léa Seydoux : “Vous entendez votre colère ?” Est-ce que j’ai de la colère ? Oui, bien sûr. Souvent je la contiens, je la garde pour moi. C’est dans mon caractère. La colère, on essaie de la transformer et le cinéma est un moyen de la transformer. Nocturama en est l’exemple. C’est aujourd’hui mon film le plus connu et aimé par un public jeune. Plus que L’Apollonide, par exemple. Je reçois du courrier tous les jours sur Nocturama. Que de spectateurs jeunes. À sa sortie, il n’a pas marché. Le film était associé aux attentats islamistes et paraissait en décalage. À partir de 2018, il a davantage fait écho aux Gilets jaunes, à la politisation accrue de nouvelles générations, à leur colère.

Le Temps qui reste

Je viens de lire un très court livre de Patrick Boucheron, Le Temps qui reste. C’est un livre absolument merveilleux car extrêmement conscient de la catastrophe mais qui refuse de se laisser engloutir par elle. Tout le travail consiste à parvenir à gérer notre masse pessimiste avec le temps qui reste.” 

La Bête de Bertrand Bonello, avec Léa Seydoux, George MacKay (Fr., 2023, 2 h 24). En salle le 7 février.
Rétrospective Bertrand Bonello à la Cinémathèque française, Paris, du 26 février au 9 mars.