Festival du court-métrage de Clermont : nos 6 découvertes

A propos de Lanzarote en général et de Michel Houellebecq en particulier de Vincent Tricon (c) Barney Production (c) Shortcuts C’est une histoire de hasard ou de hasard truqué (qu’importe, la beauté du film réside surtout dans son secret)....

Festival du court-métrage de Clermont : nos 6 découvertes

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A propos de Lanzarote en général et de Michel Houellebecq en particulier de Vincent Tricon

LANZAROTE_2.jpg(c) Barney Production (c) Shortcuts

C’est une histoire de hasard ou de hasard truqué (qu’importe, la beauté du film réside surtout dans son secret). En mai 2019, une jeune fille, celle de l’histoire, de la voix off, s’envole pour l’île de Lanzarote avec, détail qui n’en est pas un, La Carte et le Territoire de Michel Houellebecq sous le bras. Elle l’a acheté "par hasard" à l’aéroport. Arrivée sur place, c’est aussi par hasard qu’elle fait la connaissance d’une femme qui lui raconte avoir vécu une courte et intense histoire d’amour avec l’écrivain français, ici même à Lanzarote, en 1999. Après Rémy de Guillaume Lillo, Côté Cœur d’Héloïse Pelloquet ou Clean with me after dark de Gabrielle Stemmer, A propos de Lanzarote en général et de Michel Houellebecq en particulier confirme que l’un des foyers les plus stimulants du jeune cinéma français actuel se trouve bien du côté de la section montage de la Fémis dont Vincent Tricon est lui aussi diplômé.

Composé de prises de vues Google Street View et d’images tournées par Houellebecq lui-même sur l'île, dans ces tristes hôtels "all inclusive" (images fascinantes tant elles s’offrent comme un prolongement visuel de son œuvre), legs de l’écrivain à son ancienne amoureuse et confiées ici à la narratrice, A propos de Lanzarote en général et de Michel Houellebecq en particulier est un film aussi mystérieux que fascinant, à mi-chemin entre le journal filmé et l’essai documentaire.

Witch is Witch ? de Marie Losier WHICH-IS-WITCH---STILLS1_1340_c.jpg(c) ecce films

Seulement quelques mois après son aussi envoûtant que délirant moyen-métrage Felix in Wonderland, portrait réflexif composé avec et autour du musicien allemand Felix Kubin, Marie Losier est de retour avec un très court film de six minutes dans lequel miroitent joyeusement les ingrédients de son cinéma, son goût du collage, du déguisement. Dans cet instantané de cinéma, où les images s’éclairent et meurent comme des fleurs colorées, se croisent une histoire de mort (celle d’un soldat), de forêt magique, de sorcières (à moins que ce ne soit des anges ?) et de musique obsédante (composée par l’ami Felix Kubin, ici également acteur)… Les trois actrices en charge du macchabée ne sont autres que Joana Preiss, Claire Doyon et Elina Löwensohn (icône du cinéma de Mandico dont le spectre est ici très présent) nymphéas tout de blanc vêtues, aux fronts tachés de sang, chirurgiennes du cœur et belles héroïnes de ce conte pop.

Le Cercle d’Ali d’Antoine Beauvois-Boetti

le-cercle-d-ali.png(c) H Rouge Productions

Une méchante tradition française voudrait qu’une partie de notre cinéma national s’offre comme le miroir de notre société, serve d’outil pour illustrer notre monde, plutôt que d’en révéler les sens cachés, les replis. La belle prouesse du Cercle d’Ali est d’éviter ce piège du film à sujet auquel succombent nombreux courts-métrages nourris de bonnes intentions mais pauvres en cinéma. Ici, il est question de Salman, Afghan de 22 ans, ayant quitté ses terres pour rejoindre clandestinement la France. Mais ce qui reste et marque en profondeur, dans cette histoire d’arrachement, n’est pas seulement la condition d’immigré du garçon mais bien son portrait : son âge, son visage, ses pleurs, son goût pour le foot et pour le buzkashi, sport national afghan filmé comme un ballet qui donne au film sa belle sécheresse documentaire.

Maalbeek d’Ismaël Joffroy Chandoutis

maalbeek20200518_0072_0.jpg(c) Les films du Grand Huit (c) Les Films à Vif

Comment raconter ce que l’on ne peut raconter, montrer ce qui n’est pas montrable, rendre visible ce qui a été oublié ? Ce sont ces questions qui habitent Maalbeek, le passionnant nouveau film d’Ismaël Joffroy Chandoutis, déjà passé et récompensé à Clermont pour Swatted en 2018. Pour ce nouvel essai, le jeune cinéaste s’intéresse à l’attentat de Maelbeek, cette station de métro belge cible d’une explosion le 22 mars 2016 à Bruxelles, au travers du témoignage de l’une de ses rescapé·es, amnésique de ce trauma, incapable de se rappeler un événement dont tout le monde connaît pourtant les images.

Le film rejoue cette journée de black-out en même temps qu’il s’offre comme une quête pour son "actrice principale", partant à la recherche des débris de sa mémoire. Sur l’écran, les images animées, découpant les lieux, les visages en pointillés comme des tableaux animés cherchant à restituer la matière et la saveur du souvenir, et les vidéos amateurs s’entremêlent pour former une mosaïque d’impression. Recoller les morceaux pour remettre "des images là où il n’y en a pas".

Mat et les gravitantes de Pauline Penichout

mat_stills_1.1.1.jpg(c) La Fémis

En 1971, Carole Roussopoulos réalise Y’a qu’à pas baiser. La cinéaste y filme les rues de Paris, bondées de manifestantes qui exigent la légalisation de l’avortement ainsi qu’un appartement dans lequel une jeune femme subit justement un avortement clandestin. S’il fait état d’un fait de société majeur dans l’histoire nationale, Y’a qu’à pas baiser, bien plus qu’un simple témoignage, fait office de véritable manifeste féministe et sororal. C’est sur terrain, celui d’une sororité prônée comme un refuge, une résistance, que Mat et les gravitantes communique avec le film de Roussopoulos.

Dans ce film documentaire, des Nantaises se réunissent pour un examen d’auto-gynécologie, examen clinique certes mais par lequel glisse une quête existentielle qui passe par le corps et l’apprentissage de ses sensations. Dans ce film fabriqué à plusieurs (une dizaine de noms crédités au générique), où circulent toutes sortes de questions liées à la sexualité, à l’amour, à l’orgasme féminin, se profile le portrait de Mat, tête centrale du groupe, mais aussi d’une communauté de filles et de femmes, celles d’aujourd’hui dont le corps n’est plus objectivé par les autres mais pensé par et pour elle-même.

>> A lire aussi : “Delphine et Carole, insoumuses”, l'amitié féconde de deux artistes engagées

Trona Pinnacles de Mathilde Parquet

trona-pinnacles.jpg(c) Novanima (c) Miyu Distribution

On le sait au moins depuis Les Rapaces d’Erich von Stroheim (1924) : se rendre dans la vallée de la mort, traverser son décor aride, sous sa chaleur écrasante, n’est jamais de bon augure. Mais il se peut que l’escapade mortifère serve d’exorcisme, dénoue les tensions anciennes et les rancœurs passées. Dans Trona Pinnacles, film d’animation signé Mathilde Parquet, tout juste récompensé au festival Premiers Plans, une jeune fille assiste au délitement de la relation de ses parents qui ne se parlent plus que pour se jeter des mots au visage. Il faudra attendre la tombée de la nuit et le déchaînement des éléments, qui fonctionne ici comme une boule de neige colorée qu’on agite, pour qu’une réconciliation s’envisage. Beau film d’errance et de solitude, Trona Pinnacles est aussi le récit d’un miracle, d’une épiphanie, d’une union entre la nature et les êtres, d’une plénitude enfin retrouvée dans la nuit noire sertie de lumières étoilées.

Pour voir les films : rendez-vous ici - du 29 janvier au 6 février