Le retard sur les vaccins, la goutte de trop après les masques et les tests?

POLITIQUE - “Fiasco”, “scandale d’État”, “désastre”... Dire que la stratégie de vaccination du gouvernement est contestée relève de l’euphémisme. En faisant savoir qu’il comptait accélérer les choses, Emmanuel Macron a lui-même admis une forme...

Le retard sur les vaccins, la goutte de trop après les masques et les tests?

REJOINDRE L'ÉQUIPE DE RÉDACTION

Tu penses avoir un don pour la rédaction ?
Contacte-nous dès maintenant pour rejoindre notre équipe de bénévoles.

POSTULER

REJOINDRE L'ÉQUIPE DE RÉDACTION

Tu penses avoir un don pour la rédaction ?
Contacte-nous dès maintenant pour rejoindre notre équipe de bénévoles.

POSTULER

REJOINDRE L'ÉQUIPE DE RÉDACTION

Tu penses avoir un don pour la rédaction ?
Contacte-nous dès maintenant pour rejoindre notre équipe de bénévoles.

POSTULER

Le ministre de la Santé Olivier Véran et le premier ministre Jean Castex en amont d'une conférence de presse le 3 décembre 2020 (illustration). 

POLITIQUE - “Fiasco”, “scandale d’État”, “désastre”... Dire que la stratégie de vaccination du gouvernement est contestée relève de l’euphémisme. En faisant savoir qu’il comptait accélérer les choses, Emmanuel Macron a lui-même admis une forme d’échec, raison pour laquelle il réunit ce lundi 4 janvier -et en urgence- une “réunion de travail et de suivi” portant uniquement sur cet aspect de la crise sanitaire. 

En cause, la lenteur du processus. Et si Jean Castex et Olivier Véran avaient beau jeu de brandir la comparaison internationale pour se féliciter de la maîtrise épidémique en amont des fêtes de fin d’année, un coup d’œil rapide sur la situation chez nos voisins est cette fois loin d’être à notre avantage. À la date du 3 janvier, la France ne comptait que 516 personnes vaccinées, contre près d’un million en Grande-Bretagne, 114.349 en Italie et 238.809 en Allemagne. De son côté, le gouvernement jure qu’il ne s’agit pas vraiment d’un retard cruel mais d’un simple “décalage” qui sera rattrapé d’ici la fin du mois de janvier.

Des éléments de langage fleurant bon la communication de crise qui peinent à convaincre. Jean Rottner, président LR de la région Grand Est qui fut l’un des premiers élus à avoir été confronté à la gravité du coronavirus sur son territoire à la fin du mois de février 2020, a exprimé sa colère sur France 2.

“On poursuit une politique qui a fait les preuves de son échec dans le passé: les masques, les tests, aujourd’hui la vaccination. Quelque part, ça me détruit”, a-t-il déploré, fustigeant “l’impréparation” du gouvernement “qui fait l’éloge de la lenteur à certains moments, et qui depuis hier soir hyper-accélère”. 

Depuis le 13 octobre on interroge le gouvernement"Valérie Rabault, présidente du groupe PS à l'Assemblée

Un constat que partage Valérie Rabault, présidente du groupe PS à l’Assemblée nationale et autrice d’une proposition de résolution sur la stratégie vaccinale déposée en novembre. “Je suis sidérée. Depuis le 13 octobre, on interroge le gouvernement sur les vaccins, sur ses aspects pratico-pratiques et logistiques, pas du tout politiques. Et on n’a jamais de eu de réponse”, fulmine auprès du HuffPost l’élue du Tarn-et-Garonne, qui prépare un courrier à Jean Castex listant tous les points qu’elle souhaiterait voir éclaircis. La députée socialiste en vient même à se demander “si l’État n’a plus de capacités logistiques” alors que cette préoccupation était connue des autorités sanitaires depuis plusieurs mois.

“En creusant, on s’est aperçu que le conseil scientifique disait dès le 9 juillet qu’il fallait se pencher sur cette stratégie. Or, aujourd’hui, quand je fais une visioconférence avec la préfecture de mon département et que je demande combien de vaccins sont à disposition sur le secteur, on me répond qu’on n’en a pas la moindre idée”, regrette Valérie Rabault. Même effarement au Sénat, où la commission des Affaires sociales a demandé à auditionner Olivier Véran pour l’interroger sur la “lenteur” du dispositif. 

Si les doses peinent à arriver, les idées visant à rectifier le tir ne manquent pas, ce qui n’arrange pas vraiment cette impression d’improvisation. Ainsi, quand ce n’est pas le projet d’un “collectif citoyen” aux attributions floues qui s’attire les foudres de l’opposition, c’est le remaniement de la “task force” vaccinale du gouvernement qui vient ajouter de l’illisibilité à une stratégie qui n’en manquait pas.

Un écueil déjà observé lors de précédentes étapes cruciales de cette crise, comme pour la laborieuse mise à disposition des masques ou de la contestée politique de tests. “La similitude entre les masques, les tests et les vaccins, c’est que le pouvoir politique et l’administration soient incapables de reconnaître leurs erreurs publiquement”, observe la politologue Chloé Morin.

Le problème, c’est l’incapacité à assumer une inflexionChloé Morin, politologue

“On peut changer de discours, ce n’est pas dramatique et ça peut se comprendre. Le problème, c’est l’incapacité à assumer une inflexion. Au lieu de cela, on met en scène une colère présidentielle destinée à exonérer Emmanuel Macron de toute responsabilité dans cette stratégie. Or, nous sommes le seul pays européen à prendre nos décisions dans le cadre d’un Conseil de défense présidé par le chef de l’État”, poursuit l’autrice de Les inamovibles de la République (éd. L’Aube et Fondation Jean-Jaurès) qui estime que mettre ce retard sur le dos de la lourdeur administrative est un peu facile. 

“Ce sont des choix politiques qui ont été faits: la stratégie de la lenteur assumée conformément à la proposition de la Haute autorité de santé (HAS). Ils ont décidé d’aller lentement et aujourd’hui ils sont pris au piège de leur propre stratégie. La HAS avait recommandé une voie, mais rien ne les obligeait à la suivre”, note encore Chloé Morin, qui souligne que l’arbitrage de l’exécutif a été “calqué sur la seule question de l’acceptabilité” en raison des réticences françaises vis-à-vis du vaccin.

Des réticences qui, selon Valérie Rabault, n’ont également pas été anticipées par le gouvernement. “En Italie, ils ont fait un super clip de promotion en amont de la campagne de vaccination. En Allemagne pareil”, note l’élue socialiste. Avant de conclure: “et en France, toujours rien. Même pas un spot radiophonique”.  

À voir également sur Le HuffPost: Pour ses vœux 2021, Macron promet d’éviter “une lenteur injustifiée” sur le vaccin