Lits de réanimation et soignants spécialisés: les leçons de la crise du covid-19

Grâce à la mobilisation et au redéploiement des anesthésistes-réanimateurs et des infirmières anesthésistes (IADE), le nombre de lits de réanimation a pu évoluer pour faire face à cette crise exceptionnelle.Oui, les réanimations ont “tenu”!Le...

Lits de réanimation et soignants spécialisés: les leçons de la crise du covid-19

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Du personnel médical transporte via un hélicoptère médical un patient évacué d'un autre hôpital, au CHU d'Angers, le 15 mars 2021, dans le cadre de l'épidémie de Covid-19. Le gouvernement a déclaré le 14 mars 2021 qu'il prévoyait d'évacuer une centaine de patients atteints du Covid-19 des unités de soins intensifs de la région parisienne cette semaine, les hôpitaux ayant du mal à faire face à l'augmentation du nombre de cas. (Photo par LOIC VENANCE / AFP)

Grâce à la mobilisation et au redéploiement des anesthésistes-réanimateurs et des infirmières anesthésistes (IADE), le nombre de lits de réanimation a pu évoluer pour faire face à cette crise exceptionnelle.

Oui, les réanimations ont “tenu”!

Le nombre de lits de réanimations est d’environ 5000 en France, chiffre auquel il faut rajouter les lits de surveillance continue (USC). Il existe donc environ 11.000 places de soins critiques, ce qui place la France au 5e rang des pays de l’OCDE. Au-delà de ces chiffres, la question est de savoir si ce capacitaire s’avère suffisant. Il a bien été montré que la faible accessibilité des unités de soins critiques a été associée à une proportion plus élevée de décès par la Covid-19. Pour la France, les études ont démontré l’absence de relation entre les capacités en lit de réanimation et la mortalité associée à la Covid-19 au cours de la première vague. Il est évident que le capacitaire habituel ne peut suffire lors d’une crise sanitaire centennale et de fait, il a fallu mettre en place une organisation spécifique reposant sur l’anesthésie réanimation. Elle a consisté à développer des lits de réanimation éphémères au fur et à mesure de l’accroissement des besoins permettant, en association avec les mesures de restriction des autorités de santé et les transferts entre établissements, de couvrir les besoins de réanimation. Actuellement aucune étude n’a démontré de lien de causalité entre la mortalité des patients Covid-19 et ce type d’organisation.

Néanmoins, fort de l’expérience des 2 vagues, nous considérons que les réanimations éphémères doivent être adossées à des réanimations installées en transformant des lits de surveillance continue, et même d’hospitalisation conventionnelle. Le personnel nécessaire, médical et soignant, peut alors être recruté dans les structures sans réanimation, notamment les anesthésistes-réanimateurs et infirmier(e) anesthésistes.

 

Le capacitaire habituel ne peut suffire lors d’une crise sanitaire centennale et de fait, il a fallu mettre en place une organisation spécifique.

 

Le “désarmement” de ces réanimations dès la fin de la première vague était indispensable. Il était urgent de libérer les anesthésistes réanimateurs et les infirmières pour redémarrer l’activité chirurgicale et prendre en charge les patients dont les interventions avaient été repoussées. Le maintien des réanimations provisoires vides aurait obéré la prise en charge de ces patients.

D’une façon générale, ces événements ont montré que nous pouvions très rapidement mettre en place et faire évoluer ces structures. Maintenir du personnel hautement qualifié en “inactivité”, entre les vagues d’une pandémie, ou dans la prévision d’une catastrophe sanitaire n’a pas de pertinence dans un environnement où de nombreux territoires peinent à trouver des acteurs de santé. 

Oui, il ne faut pas oublier les “autres” patients!

Il est indispensable de préserver le plus possible les blocs opératoires et les salles de réveil pour prendre en charge les patients non Covid-19. La plasticité du système doit être pensée pour éviter toute perte de chance des patients non-Covid-19. Une adaptation continue des programmes opératoires doit être mise en place en fonction du degré d’urgence, en privilégiant la chirurgie ambulatoire et en optimisant au mieux les parcours d’hospitalisation grâce à la récupération améliorée après chirurgie (RAAC). Le focus doit être placé, non pas sur une déprogrammation systématique et nationale comme cela a été fait au cours des 2 premières vagues, mais plutôt sur une déprogrammation adaptée qui tient compte des besoins par territoire de santé. L’intérêt est de préserver le maximum de capacitaire possible pour les patients non-Covid-19.

 

Le focus doit être placé non pas sur une déprogrammation systématique et nationale, mais sur une déprogrammation adaptée qui tient compte des besoins par territoire.

 

Il est important de raisonner par bassin de population, regroupant l’ensemble des établissements de santé, en y incluant tous les acteurs publics, privés, et du service de santé des armées. Il est indispensable qu’ils se fédèrent pour répartir au mieux l’effort représenté par les différentes vagues. En effet, si des anesthésistes-réanimateurs et des infirmiers anesthésistes peuvent aller renforcer les équipes en réanimations, des chirurgiens d’établissements dont l’accès au bloc opératoire est restreint devraient avoir la possibilité d’aller opérer leurs patients dans les établissements sans réanimation. Les systèmes de financement ne devraient pas être une barrière à de telles pratiques, l’effort en temps de pandémie nécessitant une juste répartition. 

Oui il faudra réfléchir après la crise à l’organisation des réanimations en France!

Un plan d’augmentation rapide des capacités de réanimation doit être établi. Néanmoins, si la question matérielle est aisée à résoudre, il est nécessaire de prévoir la formation et la valorisation des métiers de soins critiques. Un “lit”, c’est avant tout des soignants! 

Dans la mesure où ces réanimations temporaires sont implémentées rapidement, si un plan d’urgence est anticipé, et qu’en période normale le nombre de lits de réanimation est à peu près suffisant, une augmentation massive du nombre de lits de réanimation n’est probablement pas nécessaire. Néanmoins, la répartition régionale de ces lits est déséquilibrée avec un déficit dans les zones rurales qu’il faudra corriger.

Par contre, il est urgent de renforcer quantitativement et qualitativement le personnel paramédical en nombre nettement insuffisant dans les réanimations et les unités de surveillance continue. Au-delà de la pandémie une vraie politique de recrutement, de formation, et de valorisation des métiers de soins critiques est indispensable.

Enfin, la pénurie de matériel médical et de médicaments ne doit plus se reproduire, une production assurant la sécurité de nos concitoyens étant indispensable. La création et la gestion de réserves ainsi qu’une relocalisation des productions de médicaments essentiels, doivent être mises en place. 

Oui les anesthésistes réanimateurs font de la réanimation!

Les anesthésistes-réanimateurs sont les pivots de l’offre de réanimation en France. Leur polyvalence leur permet de s’adapter aux besoins de la situation sanitaire pendant et hors crise. 

 

Au-delà de la pandémie, une vraie politique de recrutement, de formation et de valorisation des métiers de soins critiques est indispensable.

 

Il y a eu également beaucoup de discussions sur le nombre de réanimateurs en activité et formés en France. Parmi plus de 10.000 anesthésistes réanimateurs, environ 40% ont une activité en réanimation. Notre territoire compte un peu moins de 300 services de réanimation médicale et polyvalente dont au moins la moitié des médecins sont des anesthésistes réanimateurs, auxquels s’ajoute une petite centaine de réanimations chirurgicales rattachées à un service d’anesthésie réanimation. Il est donc simple de constater que les anesthésistes-réanimateurs jouent un rôle majeur dans le fonctionnement des services de réanimation. Concernant la formation, aux 75 postes annuels de médecines intensives, il faut rajouter les 465 postes par an ouverts au choix de l’anesthésie-réanimation dont on sait qu’au moins 40% auront une activité exclusive en réanimation et d’autres une activité partagée avec l’anesthésie.

La qualité de la formation en réanimation des anesthésistes-réanimateurs est excellente, répondant aux critères exigés par les experts européens de la réanimation.

L’histoire de la médecine montre qu’en grande partie la réanimation moderne est issue de l’anesthésie, pour exemple on pourrait citer l’exemple de la pandémie de poliomyélite au début des années cinquante qui a vu la naissance de la ventilation mécanique. Ces activités ont des fondements communs, tant pour les gestes techniques, l’approche holistique et la réflexion médicale. La polyvalence de la formation étant l’essence de la sécurité des soins dans les établissements de santé.

Enfin, si l’on doit augmenter le nombre de réanimateurs en France, il serait logique de privilégier la filière Anesthésie-Réanimation car elle permet de former des médecins polyvalents capables de répondre à la demande chirurgicale et procédurale en temps hors crises, et de prendre en charge efficacement les patients en soins critiques lors des crises.

 

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