Comment TikTok transforme petit à petit l’industrie de la musique

Il a suffi d’une vidéo de 10 secondes pour que Life Without Buildings se fasse une deuxième jeunesse. En janvier 2021, la formation écossaise a annoncé la réédition de Any Other City (2000), son unique album, après un retour en force inattendu...

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Il a suffi d’une vidéo de 10 secondes pour que Life Without Buildings se fasse une deuxième jeunesse. En janvier 2021, la formation écossaise a annoncé la réédition de Any Other City (2000), son unique album, après un retour en force inattendu sur les plateformes de streaming. Séparé depuis plus de 20 ans, le groupe signé sur le label Tugboat Records a été redécouvert par les jeunes utilisateurs de l’application TikTok, qui se sont mis à utiliser et diffuser massivement le titre The Leanover. A l’origine de ce regain d’intérêt inespéré, une vidéo publiée en décembre 2020 par la chanteuse Beabadoobee, dans laquelle la jeune femme lipsync (action de synchroniser le mouvement de ses lèvres avec les paroles d’une chanson) sur le titre.

En quelques heures, TikTok s’enflamme : plusieurs dizaines de milliers d’utilisateurs se montrent en train de danser, de se maquiller ou encore de se balader en utilisant le morceau. En parallèle, sur les plateformes de streaming, le nombre d’écoutes s’envole et le titre comptabilise plus de trois millions de passages. Matt Henry, responsable marketing chez Beggars (qui réédite l’album en vinyle), n’en croit toujours pas ses yeux : “Ce qui est dingue, c’est qu’avec TikTok, on voit des morceaux ressurgir, alors qu’ils sont sortis des années avant la naissance des utilisateurs de l’application !”

L’histoire paraît incroyable, mais n’est pas un cas isolé. Depuis le lancement de la plateforme il y a cinq ans, plusieurs groupes ont vu leur cote de popularité remonter en flèche, à l’image des Cocteau Twins ou de Fleetwood Mac. Si les réseaux sociaux sont, depuis leur création, de formidables outils de partage de musique, TikTok bat des records d’efficacité. Il faut dire que l’application était à l’origine dédiée aux vidéos de danse et de synchronisation labiale. Sous chaque clip, à la manière d’un hashtag, la plateforme met en avant le titre joué et permet, en cliquant dessus, de découvrir les centaines d’autres vidéos qui l’utilisent. “Alors qu’Instagram s’appuie plutôt sur le côté visuel, TikTok est vraiment une plateforme qui met la musique au 1er plan”, analyse Matt Henry.

Tout le monde peut être célèbre

Compliqué, donc, d’y être fermé lorsqu’on travaille dans l’industrie musicale. Les labels, en tout cas, l’ont bien compris. En février dernier, le groupe Universal a d’ailleurs signé un deal décisif avec l’application, avec, comme double objectif, une meilleure rémunération des artistes du groupe, et un catalogue élargi pour les utilisateurs de TikTok. Mais la plateforme ne sert pas seulement d’outil de promotion pour des titres déjà existants. Chaque jour, son algorithme permet à de nouveaux artistes de se faire connaître.

C’est le cas de Jessia, jeune canadienne d’une vingtaine d’années. “Ma vie a radicalement changé en à peine trois mois” s’enthousiasme la jeune musicienne, débordante d’énergie. Depuis qu’elle a percé sur TikTok, elle a pu “signer un record deal” (comprendre un contrat dans une maison de disques) et entend sa chanson à la radio tous les jours. Pourtant, il y a à peine un an, Jessia était loin de s’imaginer vivre ça. Après avoir perdu son job de serveuse suite à la pandémie de Covid-19, elle se lance sur TikTok : “Ça faisait un moment que j’écrivais de la musique, et j’avais envie de la partager. Mais quand j’ai commencé à poster mes chansons sur TikTok, je n’avais qu’une vingtaine de vues à chaque fois”.

En janvier 2021, son nombre d’abonnés s’envole après la publication d’une vidéo dans laquelle la jeune femme chante à capella, depuis sa voiture, des paroles prônant le body-positivisme. “Je ne sais pas si c’est totalement pourri ou si c’est un tube” prévient-elle, hilare, en guise d’introduction. Visiblement, c’est un succès. Son ami musicien et producteur Elijah Woods reprend ce brouillon pour en produire un morceau. Le titre “I’m not Pretty” est né. En moins de 48h, il regroupe plus d’un million d’écoutes sur Spotify, et Jessia décroche un contrat pour son 1er album. “Ce que j’aime, sur TikTok, c’est que c’est une appli qui offre à tout le monde une chance de devenir connu”.

@jessiamusic

#duet with @elijahwoodsmusic TAG HIM!!! OMG OMG OMG!!!!! #fyp #pretty #belly #???? #new #newyear #MyStyle #omg #viral #wut #yes #duetme #music #react

♬ original sound – elijah woods

“Courir après l’algorithme, je trouve ça nul”

Devenir célèbre, ce n’est pourtant pas ce qui a attiré Myd au départ. Depuis presque deux ans, le producteur français, signé sur Ed Bander Records, partage avec ses 4500 abonnés des extraits de son quotidien sur un ton décalé : “Ce que j’aime dans la vie, c’est la musique, et expliquer des blagues”, résume-t-il. Si au départ, Myd avait tenté de lancer des chorégraphies sur certains de ses morceaux, il a vite laissé tomber. 

@mydsound

#duo avec @sarah_bossuwe JE RÉPONDS À TOUS LES TIKTOK QUI UTILISENT MA MUSIQUE

♬ Moving Men – Myd & Mac DeMarco

“Aujourd’hui, quand je vois des artistes qui courent après l’algorithme, je trouve ça nul. Personnellement, dans 15 ans, je ne veux pas me dire ‘ah oui, ce morceau-là, c’était mon tube. Je l’ai fait pour un truc qui s’appelait TikTok, mais je ne l’aime pas.”

Aujourd’hui, son compte réunit une centaine de clips. Myd s’est mis en tête de répondre parodiquement à chaque internaute utilisant son titre Moving Men dans une publication TikTok. “Je suis tombé sur la vidéo d’un Indien, qui élève des poules, et qui utilise mon son dans une de ses vidéos. J’ai trouvé ça génial ! Ma musique, elle n’est pas faite pour rester dans les clubs parisiens, mais pour vivre et être écoutée par des gens partout dans le monde, et c’est à ça que sert TikTok !”