Depeche Mode vous manque ? Précipitez-vous sur le nouvel EP de Martin Gore

Ayant démarré au printemps 1980 et sorti son premier single, Dreaming of Me, en février 1981, Depeche Mode existe depuis quarante ans et jouit à travers le monde d’une immense popularité. Reconnaissable à son visage d’angelot lunaire, aux longues...

Depeche Mode vous manque ? Précipitez-vous sur le nouvel EP de Martin Gore

REJOINDRE L'ÉQUIPE DE RÉDACTION

Tu penses avoir un don pour la rédaction ?
Contacte-nous dès maintenant pour rejoindre notre équipe de bénévoles.

POSTULER

REJOINDRE L'ÉQUIPE DE RÉDACTION

Tu penses avoir un don pour la rédaction ?
Contacte-nous dès maintenant pour rejoindre notre équipe de bénévoles.

POSTULER

REJOINDRE L'ÉQUIPE DE RÉDACTION

Tu penses avoir un don pour la rédaction ?
Contacte-nous dès maintenant pour rejoindre notre équipe de bénévoles.

POSTULER

Ayant démarré au printemps 1980 et sorti son premier single, Dreaming of Me, en février 1981, Depeche Mode existe depuis quarante ans et jouit à travers le monde d’une immense popularité. Reconnaissable à son visage d’angelot lunaire, aux longues boucles blondes frisottantes dans sa jeunesse, Martin Gore occupe une place essentielle au sein du quatuor anglais.

A la guitare et aux synthés, il chante aussi parfois, d’une voix plus éthérée que celle du chanteur du groupe, Dave Gahan. Surtout, il assume le rôle de compositeur principal depuis le tout début ou presque – Vince Clarke, compositeur initial, s’étant envolé la même année vers d’autres aventures, notamment Yazoo et Erasure.

Artisan majeur de l’identité musicale de Depeche Mode, Martin Gore développe en parallèle une œuvre solo particulièrement substantielle. Paru en 1989 et vite devenu un objet de culte, Counterfeit e.p. en constitue le premier jalon. On y trouve des reprises de six chansons fétiches, parmi lesquelles la sublime In a Manner of Speaking de Tuxedomoon. Semblant provenir d’un cabaret new wave de la dernière chance, elles distillent une pop atmosphérique raffinée et nimbée de mélancolie dont le délicat vibrato du chant accroît encore le pouvoir d’envoûtement.

Une inflexion sensible vers la musique électronique

En 2003, près de quinze ans après ce disque inaugural, Martin Gore lui apporte une suite avec l'album Counterfeit², composé lui aussi uniquement de reprises. Avec autant de maestria sur le plan vocal que sur le plan musical, il se réapproprie ici notamment Loverman de Nick Cave, Tiny Girls d’Iggy Pop, By This River de Brian Eno ou encore Candy Says du Velvet Underground. Traversant une gamme plus large que le Counterfeit e.p., entre pop intimiste, soul futuriste et blues avant-gardiste, l’ensemble – aux textures très riches – marque une inflexion sensible vers la musique électronique.

Cette évolution va se vérifier et s’amplifier sur l’album suivant, MG. Paru en 2015, il contient seize morceaux instrumentaux originaux qui s’inscrivent dans un format pop au niveau de la durée (3’30 en moyenne) mais sondent un univers absolument électronique, plutôt sombre et distordu, quelque part entre LFO, Pan Sonic et Plastikman. Martin Gore y approfondit en solo les trépidantes explorations menées avec Vince Clarke sur le ravageur album Ssss en 2012 et cosigné VCMG.

Dans le prolongement strident de l’album MG surgit à présent The Third Chimpanzee, nouvel EP solo 100 % instrumental et electro. Réalisés en grande partie pendant les premiers mois de la pandémie de Covid-19, les cinq morceaux qui le composent ont pris forme dans le home studio de Martin Gore. Celui-ci répond à nos questions par téléphone avec une cordialité chaleureuse et souvent rieuse. “Je passe beaucoup de temps dans mon studio, confie-t-il. Même si je ne me sens pas particulièrement créatif, j’y vais tous les jours, du lundi au vendredi, en général plutôt l’après-midi, et j’y reste plusieurs heures.”

“Parfois, je n’y fais rien de spécial, je m’assieds juste là. Ça m’aide à garder l’esprit sain. Ce studio est un sanctuaire, personne d’autre n’est autorisé à y entrer.” (rires) Aménagé dans la maison de Martin Gore, à Santa Barbara (Californie), où il vit depuis 2000, et joliment baptisé Electric Ladyboy, son studio a la réputation d’un antre débordant d’instruments et d’appareils, notamment des synthés modulaires. Pour concevoir The Third Chimpanzee, le musicien anglais a eu recours en particulier au Panharmonium, un module Eurorack qui recrée synthétiquement des sons à l’aide d’oscillateurs.

“J'aime la façon dont ce disque rend floue la frontière entre l’homme et le singe”

Morceau introductif du maxi, tout en éclats crépitants, Howler est aussi le premier à avoir été finalisé, un peu avant la pandémie. “Il contient un son de voix modifié synthétiquement qui évoque non pas un être humain mais une autre sorte de primate, explique Martin Gore. C’est pourquoi j’ai eu l’idée de lui donner le nom d’un singe, en l’occurrence Howler [alouate ou singe hurleur en VF]. L’envie m’est venue ensuite de créer une série de morceaux instrumentaux titrés avec différents noms de singes en utilisant des sons de voix modifiés synthétiquement. Tous les morceaux seraient ainsi connectés entre eux, auraient quelque chose en commun.

Ainsi va se développer The Third Chimpanzee, véritable concept-EP dont le titre est emprunté au livre Le Troisième Chimpanzé : essai sur l'évolution et l'avenir de l'animal humain (Gallimard/Folio), écrit par le chercheur américain Jared Diamond. L’ayant lu il y a des années, Martin Gore a eu un déclic en entendant les sons étranges, entre l’humain et l’animal, générés synthétiquement. “J’ai repensé au livre et je trouvais amusant de donner ce titre au disque. Surtout, j’aime la façon dont il rend floue la frontière entre l’homme et le singe.

Sculptés dans une zone chaotique entre electro, ambient et techno, les cinq morceaux du EP forment un bloc compact et vibrant, aux reflets industriels prononcés. Très percussif et abrasif, Mandrill apparaît le plus frappant, tandis que Vervet, long et lancinant mantra rythmique de huit minutes, exerce une force d’attraction irrésistible.

Si des remixes, annoncés comme excellents par l’intéressé, doivent arriver bientôt, un album n’est en revanche pas prévu. “Le concept marche bien sur la longueur d’un EP mais risquerait de devenir laborieux sur tout un album”, constate Martin Gore, sans doute à raison. Pas grave : même s’il est relativement court (23 minutes), The Third Chimpanzee se révèle suffisamment dense et intense pour stimuler longuement l’oreille autant que l’esprit.

MartinGORECOVER.jpg

 The Third Chimpanzee (Mute/PIAS)