HotWax, portrait d’une relève rock made in Hastings

Énergie et fureur juvéniles (presque) infaillibles, c’est au saut du lit que les trois Anglais⋅es décrochent le téléphone pour nous répondre. Texas, neuf heures tapantes. Leurs voix encore ensommeillées, quelques bâillements à peine contenus...

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Énergie et fureur juvéniles (presque) infaillibles, c’est au saut du lit que les trois Anglais⋅es décrochent le téléphone pour nous répondre. Texas, neuf heures tapantes. Leurs voix encore ensommeillées, quelques bâillements à peine contenus trahissent une (petite) fatigue… Justifiée. La veille au soir, HotWax performait à Austin – étape d’une tournée aux États-Unis qui les conduit, pour la toute 1ère fois, sur les routes américaines. Récit qu’ils entament avec une excitation certaine, qui ne tarde pas à prendre le pas sur la torpeur du matin. Il y a là quelque chose d’invraisemblable et de définitivement grisant pour ceux qui, deux ans auparavant, étaient encore sur les bancs du lycée. 

Car à 20 ans à peine, Tallulah Sim-Sauvage, Lola Sam et Alfie Sayers – qui disent jouer “autant que possible” – s’imposent petit à petit sur la scène rock de Brighton, à coups de riffs et morceaux incendiaires. Lesquels irradient en Angleterre mais pas seulement, faisant émerger un succès aux allures de rêve éveillé. À mille lieues de jouer les je-m’en-foutistes éhonté·es, il et elles semblent s’émerveiller de tout, à commencer par ces aventures outre-Atlantique, “folles”. Et si dans le titre Rip It Out, Tallulah chante d’une voix presque revêche : “I’ve never felt so much pain we need time to rest”, le temps semble plutôt celui de la joie et du mouvement pour ces trois compères de longue date. 

Du collège aux studios

HotWax est né il y a une poignée d’années déjà, d’une rencontre. Celle de Tallulah et Lola, à leurs 12 ans, alors qu’elles n’étaient encore qu’au collège. Ensemble, elles s’échangent guitare et basse, nourrissent leur passion pour le rock, participent même à un tremplin musical dans la ville de leur enfance : Hastings. Jusqu’à rencontrer Alfie, quelque temps après, à l’école de musique de Brighton. Ces trois-là s’entendent tout de suite, multiplient les répétitions et s’affairent à composer. Prémices d’un groupe formé dans la spontanéité la plus totale.

À leur alchimie se mêle l’envie, tout aussi impulsive qu’irréfléchie, de jouer. Puis tout s’est accéléré, dans un enchaînement qui les dépasse encore un peu aujourd’hui. “On a rencontré notre manager, on a commencé à travaillé avec lui, puis on a signé”, retrace Tallulah. Aujourd’hui, le trio revendique deux EP, sortis via le label Marathon Artists : A Thousand Times, en 2021 et Invite Me, Kindly, dans les bacs depuis le 18 octobre – mixé par les soins d’Alan Moulder, producteur aux collaborations ultérieures de prestige. “Quand on a su qu’il voulait le faire, on arrivait pas à le croire, parce qu’il a travaillé sur certains de nos albums préférés”, s’enthousiasme encore Lola. Au hasard : Fever To Tell des Yeah Yeah Yeahs, Villains de Queens of the Stone Age ou encore Favourite Worst Nightmare d’Arctic Monkeys.

“De plus en plus punky”

Musicalement, les trois adulescent⋅es se placent en héritier⋅es du grunge, troquant ses émanations grises et résignées avec d’ardentes couleurs. Avec HotWax, le désarroi ne se mue jamais en fuite en avant. Il vient mâtiner les cordes et voix corrosives, file des textes qui font le récit des adolescences d’aujourd’hui – pas si différentes de celles d’hier, entre ébauches de relations qui éraflent, colère dévorante et errances identitaires – et tendrait même à s’effacer derrière cette esthétique arty et flamboyante, tignasse orange et leggings roses à l’appui. 

On y entend aussi bien les turbulences de Hole, la fougue de The Breeders que la candeur factice de Wet Leg, mélange sur lequel on saupoudrerait une véhémence très Kathleen Hannaesque. Des sonorités que le groupe range pourtant derrière l’étiquette “rock psychédélique”, tenant tout de même à préciser que “petit à petit, [leurs] compos sont devenues de plus en plus en plus punky”. Voilà qui reflète sans doute les nombreuses influences du trio, qui “écoute beaucoup Yeah Yeah Yeahs, PJ Harvey, Mink Mussle Creek… et pas mal de rock moderne”. Même si ce qui les a rassemblé·es à leurs débuts, c’est bien le fourmillement artistique des nineties. “C’est ce qu’on aime vraiment et ce qui nous met d’accord. Le grunge des années 1990 nous a permis de nous connecter musicalement”, analyse Tallulah. 

Émancipations 

Quant aux études, les trois Anglais⋅es y ont rapidement coupé court, préférant la fièvre des concerts. Tallulah et Lola, une fois le lycée achevé, Alfie il y a seulement deux mois, après avoir passé une tête à l’université. Une décision vite prise au gré de ces soirées face au public : “C’est vraiment un exutoire. Quoi que tu ressentes ce jour-là, tu sors de scène avec ce sentiment tellement génial”, explique-t-il. Terrain de jeu où il et elles ont appris à se déployer, s’affirmer, s’exprimer. Grandir, en somme.

“Je pense que jouer sur la scène m’a donné plus de confiance en tant que personne. J’y suis intouchable, en quelque sorte, par l’adrénaline qu’elle me procure”, s’épanche Lola. Et de poursuivre, louant ces moments “où l’énergie circule dans la pièce et où tout le monde la ressent”. “Tu essaies de te connecter avec eux par le biais de ta musique, c’est vraiment beau”, renchérit-elle. Tallulah poursuit, mentionnant une nouvelle fois cette tournée américaine, riche de rencontres et de rêves en passe d’être accomplis : “En ce moment, on joue dans des salles plus grandes, c’est vraiment incroyable de pouvoir se produire devant de nouvelles personnes, c’est ce qu’on a toujours voulu faire.”

À l’orée de l’âge adulte, c’est par sa musique que le trio dit au revoir à ces années de construction, pas à pas. “Notre deuxième EP signe en quelque sorte la fin de cette période, et matérialise une sortie, mentale et progressive, de l’adolescence. C’est un peu comme essayer de tout laisser derrière nous”, livre encore Tallulah. Comprendre : les contraintes, les attendus, les questions. Car les réponses se logent sans doute là, sur scène, nichées entre deux amplis. “Spitting out all of my doubt / I’m spitting” (Je crache tous mes doutes, je crache) rugit-elle d’ailleurs dans High Tea. Manière de reléguer les craintes au dernier rang, et d’opérer une catharsis qui rend plus grand·e. 

Les Inrocks Super Club le 13 décembre à la Boule Noire, avec Paper Tapes, Astral Bakers et HotWax. Vous pouvez déjà réserver vos billets à cette adresse.