Qui était Boris Barnet, cinéaste russe honoré d’une rétrospective à la Cinémathèque ?

Boris Barnet était un peintre de la petite histoire, de la poésie du quotidien. Avec une exigence dans la forme tout à fait remarquable, à la croisée de trois grandes influences : la Fabrique de l’acteur excentrique, collectif d’artistes qui...

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Boris Barnet était un peintre de la petite histoire, de la poésie du quotidien. Avec une exigence dans la forme tout à fait remarquable, à la croisée de trois grandes influences : la Fabrique de l’acteur excentrique, collectif d’artistes qui cherchaient à tuer l’art bourgeois par le rire (cirque, cabaret, carnaval, etc.), un sens du montage d’avant-garde, et le théâtre constructiviste, qui tendait à ramener les décors à des formes simples (cercles, triangles…). Barnet ne réalise pas de grandes fresques majestueuses et imposantes comme Eisenstein, préférant décrire les gens du peuple, leur fantaisie, leur vie quotidienne dans les kolkhozes (les grandes fermes collectives de l’Union Soviétique) ou les banlieues.

De grands critiques (Georges Sadoul d’abord, célèbre critique communiste français puis Serge Daney, ou encore Bernard Eisenschitz) n’ont cessé de lui tresser des lauriers, mais il reste encore le plus méconnu, peut-être parce que le moins grandiloquent, des grands cinéastes de l’URSS.

Festival d’inventions visuelles

Cette simplicité, ce lyrisme comique au coeur même de la société de son temps qu’il décrit parfaitement, voilà ce que l’on trouve dans une bonne partie de son oeuvre, dans des films remarquables comme l’impayable et burlesque La jeune fille au carton à chapeau (1927), l’un de ses tout 1ers chefs-d’oeuvre (muets), ou dans La Maison de la rue Troubnaïa (1928), festival d’inventions visuelles effectivement constructivistes. Tout en restant ancré dans le réel en dénonçant, notamment, la corruption de certains.

On la trouve aussi dans Le Faubourg (Okraïna en VO) en 1933, et surtout dans Au bord de la mer bleue (1936), superbe film (l’histoire de deux amis marins qui se disputent la même fille, une belle cadre blonde taquine du kolkhoze qui aime bien tirer la langue aux hommes) à qui fut reproché beaucoup de choses (son formalisme, la trop grande simplicité de ses personnages), mais qui est surtout un hymne joyeux à la vie, à l’amour et à la mer, magnifiquement filmée. Un film qui fait parfois penser au cinéma de Jean Vigo, et qui annonce la liberté des films de Jacques Rozier ou l’insolence des 1ers Godard.

Encensé par Godard

En règle générale, les films de Barnet, formé au cinéma par deux grands réalisateurs et théoriciens (Poudovkine et Koulechov), déplurent aux autorités staliniennes de l’URSS, qui leur préféraient des oeuvres plus sérieuses, plus politiques, plus amples – surtout quand l’avant-garde artistique née dans le sillage de la Révolution de 1917 devint peu à peu synonyme d’art bourgeois décadent, considéré comme trop intellectuel.

Après la Seconde Guerre mondiale, Boris Barnet eut du mal à retrouver la liberté dont il disposait dans les années 20 et 30, méprisé par l’industrie cinématographique soviétique qui préférait l’académisme à l’humour et rencontrait par ailleurs des difficultés financières. Toutefois, Le lutteur et le clown, sorti en 1958, encensé en France par Jean-Luc Godard, est considéré comme l’un de ses meilleurs films et sera projeté à la Cinémathèque.

Né à Moscou, Boris Barnet finit par se donner la mort en 1965, à Riga, en Lettonie, pays balte alors membre de l’URSS. Il avait 62 ans. Il demeure le plus grand auteur de comédies de l’URSS.

Rétrospective Boris Barnet, du 14 février au 10 mars à la Cinémathèque française, à Paris